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  • 18.08.2022

#TeachersTransform : un bâtiment, deux écoles – comment le partage des ressources a permis de transformer l’enseignement dans ce centre de réfugiés au Kenya

Comment prendre en charge 18 900 apprenants dans neuf écoles secondaires lorsque l’on dispose de ressources limitées ? Voilà le défi auquel a dû faire face l’équipe chargée de l’enseignement dans le camp de réfugiés de Kakuma, au Kenya. Leur solution ? Créer deux écoles en une.

George Nandy, responsable de l’éducation pour Windle International au Kenya, supervise l’enseignement secondaire dans le camp de réfugiés de Kakuma et dans l’établissement de Kalobeyei. Cette organisation appuie et organise des interventions éducatives dans le camp de Kakuma, qui compte plus de 180 000 réfugiés originaires du Soudan du Sud, du Soudan, de la Somalie, de la République démocratique du Congo, du Burundi, de l’Éthiopie et de l’Ouganda. Elle est soutenue par le Gouvernement du Kenya, le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR) et d’autres donateurs et partenaires.

George a grandi dans une famille de 18 enfants disposant de très peu de ressources. Il comprend donc bien certaines des difficultés auxquelles doivent faire face les apprenants réfugiés.

« Je suis ici parce qu’un enseignant s’est sacrifié pour que je puisse aller à l’école, en achetant un uniforme et du matériel scolaire pour moi. Je suis là pour aider. » Voilà ce que nous explique George, qui a enseigné pendant plus de six ans dans les écoles de Kakuma avant d’occuper ses fonctions actuelles. « En travaillant dans le camp de réfugiés, je peux aider ces apprenants qui sont tous vulnérables. Ils ont vécu tant d’événements traumatisants et sont confrontés à de très nombreuses difficultés. Mais en transformant leur éducation, nous pouvons les aider à acquérir les compétences dont ils auront besoin pour se forger un brillant avenir. »

Tirer le meilleur parti des ressources disponibles pour transformer l’éducation à Kakuma

On trouve 21 écoles primaires dans le camp de Kakuma, mais seulement sept écoles secondaires. Avant que George et son équipe ne se chargent de transformer l’éducation dans le camp de réfugiés en 2015, des milliers d’apprenants étaient contraints d’abandonner leur scolarité, car il n’y avait tout simplement pas assez d’espace pour les accueillir.

George explique : « Pour faire face au nombre croissant d’étudiants, nous avons discuté avec le directeur exécutif de Windle de l’époque, le Dr Marangu Njogu. Il a proposé une approche innovante de l’éducation, qui consiste à créer deux écoles en une. »

George poursuit : « Notre système mise sur le temps, qui est l’une des ressources principales dont nous disposons. Nous nous sommes rendu compte qu’en divisant la journée en deux, nous pourrions mettre en place deux écoles et accueillir deux fois plus d’apprenants dans un même bâtiment. Chaque école a sa propre équipe d’enseignants, dirigée par un proviseur en chef aidé par deux adjoints. Même les uniformes des apprenants sont différents afin de garantir qu’ils assistent aux cours de l’école dans laquelle ils sont inscrits. »

Le système deux-en-un, comment ça marche ?

Une journée d’école normale commence à 8 h et finit à 16 h 30. Elle est jalonnée de pauses plus ou moins longues ainsi que de séances de sport et de réunions de clubs et de sociétés. George nous explique : « Avec notre système de deux écoles en une, les activités sont condensées, afin que tout puisse être fait en six heures. »

« Les élèves du matin se rendent à l’école dès 6 h 40 et terminent les cours à 12 h 20. Ils ont deux courtes pauses pendant la matinée. Dix minutes plus tard, c’est la deuxième école qui ouvre ses portes dans le même bâtiment. Les élèves de l’après-midi arrivent à 12 h 30 et partent à 18 h 30. »

« Les activités parascolaires, sportives, liées aux clubs et aux sociétés, ainsi que les réunions, sont tenues hors des horaires scolaires de chaque école. Par exemple, les élèves de l’école du matin participent aux activités extrascolaires l’après-midi. Les élèves de l’école de l’après-midi participent aux activités extrascolaires dans la matinée. »

Avantages du système deux-en-un

George affirme : « Grâce à ce système, nous n’avons pas besoin de mobiliser de financement pour construire de nouveaux bâtiments.»

« Les deux écoles se partagent les bureaux, les chaises, les casiers, les classes, les laboratoires, la cuisine, les toilettes, les installations de lavage des mains, la bibliothèque, les ouvrages de référence, les équipements informatiques et sportifs, les cours de récréation et les espaces de réunion. »

Ce système innovant permet aussi de réduire la fatigue des enseignants.

« Certaines écoles kényanes adoptent des systèmes alternés dans le cadre desquels les élèves assistent aux cours à des horaires différents, tandis que les mêmes enseignants travaillent toute la journée. Cependant, cette technique épuise les enseignants. Grâce à notre système de deux écoles en une, les enseignants peuvent donner le meilleur d’eux-mêmes pendant tous leurs cours. »

La mise en œuvre d’un nouveau programme d’études transformateur nécessite des ressources importantes

Cette solution permet à plus d’apprenants d’accéder à l’enseignement secondaire dans le camp de réfugiés de Kakuma. Cependant, le ratio élèves/enseignants reste particulièrement élevé.

« Aujourd’hui, on compte en moyenne 120 apprenants par enseignant. C’est pourquoi nous travaillons avec le Gouvernement du Kenya, les donateurs et d’autres organisations afin de résoudre ce problème. »

Il sera particulièrement important de réduire ce ratio en 2023, car le Gouvernement du Kenya lancera alors un nouveau programme d’études axé sur les compétences. Au lieu de se concentrer sur les notes des élèves, cette approche vise à aider les apprenants à acquérir les compétences, les connaissances et les talents dont ils auront besoin au moment où ils quitteront l’école, que ce soit pour continuer dans l’enseignement supérieur ou commencer à travailler. Ce programme est centré sur les apprenants, et non sur les enseignants. L’objectif est qu’ils progressent et maîtrisent de nouvelles compétences, à leur propre rythme.

George explique : « Ce nouveau système, qui mettra l’accent sur les compétences en technologie de l’information et de la communication, aidera les apprenants à s’épanouir dans un monde en constante évolution. »

Cependant, ce nouveau programme d’études, même s’il présente de nombreux avantages, prévoit un maximum de 30 apprenants par classe et exige que l’enseignant accorde plus d’attention à chaque apprenant individuel.

« Nous employons 335 enseignants pour 18 900 apprenants à ce jour. Avec ce nouveau programme d’études, nous aurons besoin de plus d’enseignants, de classes, de laboratoires, de matériel informatique et pédagogique et de manuels. »

« Nous comptons sur nos généreux donateurs pour nous aider à répondre à ces besoins. Leurs dons nous permettent de construire et de mettre en place des écoles pour les enfants du camp de réfugiés de Kakuma et donc de leur donner une chance de transformer leur avenir grâce à l’éducation. »

Malgré les défis à relever, George est convaincu que l’approche axée sur les compétences permettra aux apprenants d’acquérir les compétences et les savoirs dont ils auront besoin pour faire carrière au XXIsiècle.

Les futurs artisans de la paix

Pour George, s’assurer que les apprenants ont accès à une éducation de qualité ne va pas simplement les aider à trouver des moyens de subsistance plus stables. Grâce à l’éducation, ils acquièrent des compétences qui leur permettront d’avoir un effet positif sur la société.

George explique : « L’éducation joue un rôle majeur dans le développement de la paix dans le monde. Une bonne éducation permet aux apprenants de retourner dans leur pays d’origine, d’œuvrer à la résolution de conflits et au maintien de la paix et de devenir les dirigeants de demain. »

Apprenez-en plus sur la campagne #TeachersTransform lors du Sommet sur la transformation de l’éducation.

Crédit photo : John Cummings

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  • 28.06.2022

Transformer notre compréhension des enseignant.e.s réfugié.e.s et de l’enseignement dans les contextes de déplacement forcé

Chris Henderson, coprésident de la Inter-agency Network for Education in Emergencies (INEE) Teachers in Crisis Contexts (TiCC) Working Group et Teachers College, Columbia University.


Dans les zones d’installation de populations réfugiées, les enseignant.e.s contribuent plus que tout autre facteur scolaire à l’apprentissage et au bien-être des enfants. Les enseignant.e.s réfugié.e.s sont en outre armés de solides connaissances locales et d’une volonté d’améliorer la réponse aux crises, ainsi que les résultats sur le plan de la sortie de crise. Pourtant, malgré leur rôle crucial et le contexte difficile dans lequel ils assurent la continuité de l’apprentissage, les enseignant.e.s réfugié.e.s ne reçoivent pas toujours le soutien dont il.elle.s ont besoin.

Bien que visibles auprès des acteurs du secteur de l’éducation dans le domaine humanitaire, il.elle.s continuent d’être largement ignorés dans les examens sectoriels des systèmes éducatifs nationaux qui orientent la planification pluriannuelle de l’éducation, ainsi que dans les budgets qui prennent en compte les besoins des enseignant.e.s. Il convient donc d’accorder une plus grande attention aux difficultés que ces enseignant.e.s rencontrent et de les inclure dans les plans visant à la réalisation de l’ODD 4.

Des conditions d’enseignement difficiles

Les enseignant.e.s travaillant dans les zones abritant des populations réfugiées sont confronté.e.s à des conditions de travail particulièrement éprouvantes. En effet, les régions où les personnes réfugiées sont autorisées à s’installer sont souvent dépourvues de salles de classe adéquates, de matériel pédagogique et d’autres ressources de base. Les salles de classe sont plus susceptibles d’être surpeuplées, multi-âges, multi-aptitudes et multilingues, surtout dans les premières années, lorsque sont enseignées les compétences de base en matière de lecture, d’écriture et de calcul. Les enseignant.e.s sont souvent obligé.e.s d’enseigner par roulement, couvrant moins de matière en moins de temps, avec des attentes moindres en termes de résultats d’apprentissage. Il.elle.s peuvent également être amené.e.s à enseigner des matières dans une deuxième ou troisième langue, ou à recourir à des méthodes pédagogiques hybrides.

Par ailleurs, les enseignant.e.s réfugié.e.s travaillent avec des enfants et des jeunes qui ont vécu ou ont été témoins des souffrances aiguës et chroniques de leurs familles et de leurs proches. Ces enfants et ces jeunes sont plus susceptibles de présenter des troubles de l’apprentissage ou du comportement liés non seulement à l’interruption de leur éducation, mais aussi aux difficultés qu’il.elle.s rencontrent au quotidien.

Manque de possibilités de formation

Là où des opportunités de développement professionnel avant et pendant le service existent pour les enseignant.e.s réfugié.e.s, elles tendent à être sporadiques et de qualité variable. La diversité des acteurs non étatiques qui apportent un soutien à la gestion et au développement des enseignant.e.s dans des contextes de déplacement forcé limite également les réponses prévisibles et durables aux besoins professionnels, personnels et familiaux des enseignant.e.s.

Un parcours professionnel incertain

La plupart des enseignant.e.s réfugié.e.s vivent là où leur droit à la protection internationale est reconnu, ce qui signifie, en somme, qu’il.elle.s ont le droit de ne pas être renvoyés de force dans leur pays d’origine. Or, la protection des personnes réfugiées ne garantit pas nécessairement la reconnaissance des qualifications pour l’emploi, ni l’accès à des opportunités de développement professionnel continu lorsque les enseignant.e.s ne sont pas diplômé.e.s ou sont sous-qualifié.e.s.

Il est temps de reconnaître le rôle des enseignant.e.s réfugié.e.s

Il nous arrive si souvent de défendre la cause des enseignant.e.s et de rendre hommage à leur travail. Pourtant, en tant que responsables politiques et professionnel.le.s du secteur humanitaire, nous nous devons de joindre la parole à l’acte et de respecter notre engagement envers la profession en réimaginant et en transformant notre compréhension commune des enseignant.e.s et de la valeur de leur travail dans les contextes d’accueil de personnes réfugiées. Sans un soutien et une reconnaissance suffisants des enseignant.e.s réfugié.e.s, l’accès à l’éducation et les résultats d’apprentissage des enfants touchés par le déplacement forcé resteront précaires et l’objectif 4 des ODD ne sera pas atteint.

Il est donc temps d’accorder aux enseignant.e.s réfugié.e.s le statut et les conditions qu’il.elle.s méritent et dont il.elle.s ont désespérément besoin ; il est temps de donner une visibilité aux enseignant.e.s réfugié.e.s. Un mouvement vers l’inclusion des personnes réfugiées au sein des systèmes éducatifs nationaux suite à l’adoption du Pacte mondial sur les réfugiés (GCR) en 2018 offre une opportunité d’action. Il s’agit d’accorder un soutien prévisible et durable pour les enseignant.e.s réfugié.e.s, un développement professionnel continu et l’accès à des conditions de travail équitables et décentes.

Vers une compréhension commune des enseignant.e.s dans les contextes d’accueil de réfugié.e.s

Afin d’inclure les points ci-dessus à l’ordre du jour de la Piste d’action 3 – enseignants, enseignement et profession enseignante – du Sommet « Transformer l’éducation », et d’œuvrer en faveur d’une compréhension commune des enseignant.e.s et de l’enseignement dans les contextes d’accueil des réfugiés, le HCR, l’INEE et l’Internationale de l’Éducation (IE) organiseront conjointement une réunion dans le cadre du prochain pré-Sommet « Transformer l’éducation » à Paris.

Nous réunirons les représentant.e.s de gouvernements, des Nations Unies, des organisations internationales non gouvernementales et des organisations de la société civile aux côtés d’enseignant.e.s et de jeunes réfugié.e.s du Tchad, du Kenya et du Venezuela pour discuter et débattre des défis suivants :

  1. Qui considérons-nous comme des « enseignant.e.s » dans les contextes d’accueil des réfugié.e.s ? De nouvelles définitions et conditions préalables à l’entrée dans la profession pourraient-elles constituer une partie de la solution à la pénurie mondiale d’enseignant.e.s ?
  2. Comment, le cas échéant, reconnaître et régulariser les enseignant.e.s communautaires et réfugié.e.s comme partie intégrante du corps enseignant professionnel dans les contextes d’accueil des réfugié.e.s ?
  3. Quelles sont les limites ou les obstacles des cadres juridiques et des mécanismes de financement actuels, et quelles sont les approches innovantes qui existent pour surmonter les difficultés de financement ?

Cette session sera également l’occasion de donner la parole aux enseignant.e.s et aux jeunes réfugié.e.s afin de leur permettre de partager leurs expériences et de contribuer à l’élaboration d’un programme de transformation des services d’éducation dans les contextes de crise à l’échelle mondiale.

L’un des principaux résultats de cette réunion consistera en un ensemble de recommandations, élaborées par les facilitateur.rice.s de la réunion représentant l’INEE, le HCR et l’IE, et soumises à l’Équipe spéciale internationale sur les enseignants pour Éducation 2030 en vue de leur examen et leur inclusion dans les déclarations ultérieures du sommet Transformer l’éducation relatives à la Piste d’action 3.

Nous vous invitons à participer en personne ou via webcast à cette importante réunion qui se tiendra le jeudi 30 juin de 13h00 à 15h00 CET. Nous avons besoin de votre voix pour rendre visibles et mettre en valeur les enseignant.e.s réfugié.e.s lors du sommet Transformer l’éducation qui se tiendra à New York en septembre.

Pour plus de détails, veuillez consulter le programme du pré-sommet ici.

Crédit photo: M'Bera refugee camp, Mauritania. EU/ECHO/José Cendón

Nouvelles
  • 04.04.2022

Situations d’urgence : soutenir les enseignants grâce à des politiques adaptées aux crises

Rédigé par Karen Mundy, Directrice de l’Institut international de planification de l’éducation (UNESCO) et Carlos Vargas-Tamez, Chef du Secrétariat de l’Équipe spéciale internationale sur les enseignants pour Éducation 2030 et Chef de la Section pour le développement des enseignants (UNESCO).


Les événements qui se déroulent actuellement en Ukraine nous rappellent brutalement que des crises peuvent frapper n’importe où, n’importe quand. Par ailleurs, d’autres crises en cours telles que la pandémie de COVID-19 ainsi que divers conflits et catastrophes à travers le monde, y compris ceux dus aux changements climatiques, menacent la continuité et la qualité de l’éducation, en particulier pour les personnes déplacées. En 2021, le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés a indiqué que plus de 84 millions de personnes dans le monde avaient été contraintes de quitter leur lieu de vie. En 2022 ce chiffre devrait augmenter, car plus d’un million et demi d’enfants ont déjà fui l’Ukraine.

Les systèmes éducatifs sont-ils prêts à réagir ?

Les systèmes éducatifs ne sont généralement pas suffisamment préparés à faire face aux crises, qu’il s’agisse d’accueillir l’arrivée soudaine des enfants réfugiés, d’assurer la sécurité des apprenants et des enseignants, ou de devoir passer rapidement à l’apprentissage à distance. De nombreux pays des plans de préparation, réponse et rétablissement après aux crises font défaut, ce qui risque d’aggraver des situations déjà chaotiques, et laissent les intervenants de première ligne avec peu d’orientations et des équipements limités pour réagir efficacement.

Les établissements scolaires et leurs communautés sont trop souvent directement ciblés par les attaques. Entre 2015 et 2019, plus de 8 000 élèves, enseignants et autres membres du personnel d’établissements scolaires de 37 pays touchés par des conflits ont été tués, blessés, enlevés, menacés, arrêtés ou détenus, selon la Coalition mondiale pour la protection de l’éducation contre les attaques. D’après de nombreux rapports, les écoles feraient l’objet d’attaques en Ukraine.

Comme la pandémie de COVID-19 l’a montré, les enseignants, qui sont eux-mêmes touchés par la crise, assument souvent un rôle de soutien essentiel auprès de leurs collègues et de leurs élèves. Ils peuvent favoriser un sentiment de sécurité et de normalité, tout en apportant aux familles et aux communautés des informations importantes. Leur soutien aux apprenants est fondamental. Toutefois, les enseignants ne peuvent exercer ce rôle que si leurs besoins sont d’abord satisfaits. 

Par exemple, ils doivent disposer des outils nécessaires pour enseigner dans des conditions de plus en plus difficiles (infrastructures endommagées, classes en sureffectif…). Ils doivent aussi pouvoir adapter les méthodes pédagogiques aux apprenants habitués à des systèmes éducatifs utilisant d’autres programmes et d’autres langues. Comme les enseignants sont touchés par les crises de diverses manières, ils doivent également recevoir un accompagnement psychosocial, matériel et financier adéquat afin de pouvoir soutenir les apprenants. 

Soutenir les systèmes éducatifs afin d’élaborer des politiques enseignantes adaptées aux crises

Si nous voulons que les enseignants puissent assumer un rôle essentiel de soutien et de protection afin de garantir une éducation inclusive et de qualité, et de promouvoir la cohésion sociale et la résilience, il est essentiel de tenir compte des situations d’urgence et de crise lors de l’élaboration et de la mise en œuvre des politiques enseignantes nationales. Cela implique d’anticiper et de relever les défis du recrutement, du déploiement, de la rétention et de la formation des enseignants, tout en veillant à leur bien-être, à la sécurité de leur emploi et à ce qu’ils disposent de conditions de travail sûres, dans un environnement favorable.

En 2021, les organisateurs de l’Initiative norvégienne sur les enseignants ont rejoint l’Équipe spéciale sur les enseignants et l’Institut international de planification de l’éducation de l’UNESCO. Ensemble, ils ont mis au point un nouveau module qui reconnaît le rôle important joué par les enseignants dans la préparation et la réponse à ces situations et vise à éclairer l’élaboration et la mise en œuvre de politiques enseignantes nationales adaptées aux situations d’urgence et de crise.

Ce nouveau module complète le Guide pour l’élaboration d’une politique enseignante de 2019. Il souligne la nécessité de mettre en place des politiques enseignantes adaptées aux crises pour accroître la résilience des systèmes éducatifs en veillant à ce que les acteurs de l’éducation soient mesure de se préparer et de répondre aux crises. Il aborde les différentes dimensions de la politique enseignante et propose de nouvelles mesures visant à soutenir les enseignants dans leur travail de prévention, d'atténuation et de rétablissement après des conflits et des catastrophes. Le module comprend aussi des exemples nationaux de politiques et de pratiques efficaces en matière de gestion des enseignants dans des situations de crise.

Les politiques enseignantes qui prennent en compte les effets des crises dans la profession peuvent motiver le personnel et encourager un travail de qualité. Ces politiques sont essentielles non seulement pour soutenir et protéger les enseignants, mais aussi pour les préparer à offrir aux enfants vulnérables des espaces d’apprentissage sûrs et une éducation de qualité, protégeant ainsi ce droit fondamental universel.

Le nouveau module sur l’élaboration de politiques enseignantes adaptées aux crises peut être téléchargé sur le site Web de lÉquipe spéciale sur les enseignants.

À propos du Guide pour l’élaboration d’une politique enseignante

Le Guide pour l’élaboration d’une politique enseignante est conçu comme un outil dynamique, destiné à relever les défis émergents en matière de politique relative aux enseignants. Il repose sur l’idée selon laquelle il est nécessaire d’adopter une politique enseignante globale afin d’améliorer la quantité et la qualité des enseignants. Pour permettre une éducation inclusive et de qualité, ces politiques doivent être exhaustives et intégrer différents aspects interdépendants relatifs à la profession, notamment le recrutement et la rétention, la formation, le déploiement, le parcours professionnel, les conditions de travail, la gratification et la rémunération des enseignants, ainsi que les normes d’exercice de la profession enseignante, la responsabilité pédagogique et la gouvernance scolaire. En outre, elles doivent être bien planifiées, dotées de ressources et alignées sur d’autres politiques, éducatives et non éducatives, pour garantir une mise en œuvre efficace.

Crédit photo : Sacha Myers, Save the Children

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  • 27.09.2021

Élaboration d’une politique enseignante adaptée aux situations de crise : webinaire et consultation internationale

Face à l’augmentation des perturbations et des crises mondiales, il ne sera pas possible de garantir une éducation de qualité inclusive et équitable pour tous d’ici 2030 ( ODD 4) si la planification de l’éducation n’est pas adaptée aux situations de crise. Les enseignants, qui sont le facteur le plus important au sein de l’établissement scolaire pour influencer les résultats de l’élève, sont souvent en première ligne dans les situations de crise. C’est pourquoi il est impératif de donner la priorité aux enseignants, de les soutenir et de les protéger par le biais d’une politique et d’une planification de l’éducation adéquates.

En s’appuyant sur la Note d’orientation sur l’élaboration d’une politique enseignante adaptée aux situations de crise élaborée conjointement par l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), l’Organisation internationale du Travail (OIT) et le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) en 2020 dans le cadre de l’Initiative norvégienne pour les enseignants (NTI), le webinaire sur les politiques enseignantes et la planification adaptées aux situations d’urgence et de déplacement qui s’est tenu le 16 septembre, a réuni des experts politiques, des représentants de pays et des enseignants pour mettre en évidence ce qui est nécessaire pour garantir une politique enseignante adaptée aux situations de crise.

Au cours d’une discussion qui a abordé les principaux aspects stratégiques du guide, les participants ont partagé les enseignements tirés des crises précédentes et actuelles, ont discuté du rôle des enseignants dans les contextes d’urgence et de déplacement, et ont plaidé pour un soutien accru des enseignants dans ces contextes.

Les déplacements créent des difficultés pour le recrutement, la formation et le déploiement des enseignants 

Si la COVID-19 a mis en lumière, à l’échelle mondiale, les difficultés auxquelles les enseignants sont confrontés lorsque la scolarité est perturbée, cette pandémie n’est qu’une des nombreuses situations de crise qui remettent en cause la continuité et la qualité de l’éducation à travers le monde. Selon le HCR (2021), fin 2020, 82,4 millions de personnes ont été déplacées de force en raison de conflits violents, de persécutions et de catastrophes naturelles.

Mme Angéline Neya Donbwa, secrétaire technique de l’Éducation en situation d’urgence au Burkina Faso, a fait écho au constat de Mme Alezuyo. Elle a ajouté qu’avec plus de 1,4 million de personnes déplacées et 2 444 écoles fermées au sein de son pays, le redéploiement d’enseignants depuis des zones ravagées par les conflits vers des villages déjà surpeuplés dans des zones plus sûres, représentait une difficulté majeure. Grace*, une enseignante déplacée originaire elle aussi du Burkina Faso, s’est exprimée sur les défis que pose l’enseignement à des enfants traumatisés. Elle a expliqué que certains de ses élèves rencontraient des difficultés à se concentrer en classe, avaient peur, ou réagissaient de manière agressive ou violente. Elle a également noté qu’au sein de sa classe, elle devait répondre non seulement aux besoins des enfants déplacés, mais aussi à ceux des enfants de la communauté du pays d’accueil.

Un soutien psychosocial et financier est primordial pour les élèves comme pour les enseignants

Un soutien psychosocial apparaît comme une dimension importante de la planification adaptée aux situations de crise. Mme Neya Donbwa a expliqué que la nécessité de recevoir cette forme de soutien avait été clairement exprimée par les communautés affectées par l’insécurité et la violence au sein de son pays. En plus d’avoir eux-mêmes besoin de soutien pour répondre aux épisodes traumatiques, les enseignants ont besoin de pouvoir faire face aux effets physiques et émotionnels de la crise sur leurs élèves. C’est ce qui a conduit l’équipe de Mme Neya Donbwa à élaborer un module pour faire face aux situations traumatiques. Ce dernier vient compléter leur formation « Safe Schools » (Écoles sûres), conçue pour préparer les enseignants aux situations de crises.  

En outre, la stabilité financière des enseignants est souvent mise à mal lors de situations de crises et d’urgence. Mme Neya Donbwa a expliqué que continuer à verser un salaire aux enseignants ayant dû fuir une zone à risques était l’une des dispositions de leur stratégie de gestion des enseignants en temps de crise. De même, Mme Alezuyo a précisé qu’en temps de crise en Ouganda, les enseignants des établissements publics avaient continué à recevoir leur salaire jusqu’à leur redéploiement. Cela n’était toutefois pas le cas des enseignants des écoles privées pendant la crise de la COVID-19, comme l’a souligné Mme Stella Turehe, une enseignante ougandaise. Mme Turehe a indiqué que les pressions financières auxquelles les écoles privées avaient été confrontées pendant cette crise avaient entraîné la fermeture de nombreuses écoles et la perte d’emploi d’enseignants.

Le respect des mesures sanitaires demande de la flexibilité et de l’innovation

Le respect des mesures sanitaires de lutte contre la COVID-19 s’est également montré difficile pour les écoles et a parfois conduit à leur fermeture complète. En Ouganda, les mesures émises par le ministère de la Santé ont limité à 20 le nombre d’élèves par enseignant. Selon Mme Turehe, les écoles des camps de réfugiés — qui ont un taux d’inscription élevé — ont eu du mal à rouvrir. Cependant, en réponse à ces mesures, des enseignants ont mis en place un certain nombre d’actions avec le soutien d’organisations non gouvernementales, parmi lesquelles la création d’un système de double vacation pour permettre la réouverture des écoles, la promotion de l’apprentissage en ligne par le biais de tablettes, et de l’apprentissage en groupe dans les communautés d’étudiants réfugiés.

De plus, les enseignants ont également fait preuve d’innovation pour soutenir l’ensemble de la communauté scolaire pendant la crise de la COVID-19 en Ouganda. Ils ont organisé des campagnes promouvant le retour à l’école, mis en place des comités pour établir des liens avec les apprenants et les parents, créé des clubs d’étudiants et offert des conseils aux adolescents.

L’importance des mécanismes de communication et de consultation

Les mécanismes de communication et de retour d’information des enseignants sont essentiels afin de s’assurer que les décideurs politiques sont suffisamment informés des conditions en évolution constante qui caractérisent les situations de crise. Mme Alezuyo a expliqué qu’il existe différents niveaux de communication entre les décideurs politiques, les enseignants et les communautés de son pays. Elle a précisé de quelle manière ces niveaux sont propices à la planification d’une éducation adaptée aux situations de crise. Le système d’information sur la gestion des enseignants recense les niveaux de formation et d’expérience, ce qui facilite le déploiement des enseignants et une planification efficace pendant les crises. La communication au niveau de l’établissement scolaire et de la communauté s’est adaptée, y compris par le biais de téléphones portables, de radios et de plateformes de réseaux sociaux.

Consultation pour un nouveau module sur la politique enseignante adaptée aux situations de crise.

Le webinaire a par ailleurs lancé une consultation internationale afin de développer un nouveau module sur la politique enseignante et la planification adaptées aux situations de crise qui vient compléter le Guide pour l’élaboration d’une politique enseignante rédigé par l’Équipe spéciale internationale sur les enseignants pour Éducation 2030. 

Le projet de module est disponible pour commentaires et suggestions d’études de cas au lien ci-dessous.

https://docs.google.com/document/d/1NC8h2fNfjYj3CxSI2jkQWOYjy2v5Zz1N/edit

Veuillez envoyer vos commentaires et suggestions avant le 1er octobre à sm.richter@unesco.org.


*Pour des raisons de sécurité, ce nom a été modifié.

Crédit photo : HCR/Eduardo Soteras                                                                     

Événement
  • 22.07.2021

Les politiques enseignantes et la planification adaptées aux situations d’urgence et de déplacement - webinaire

**Regardez les enregistrement en anglais et en français. **

Le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et l’Équipe spéciale internationale sur les enseignants pour Éducation 2030 ont le plaisir de vous convier à un webinaire organisé dans le cadre de l’Initiative norvégienne sur les enseignants : Renforcer la coopération multipartenaires pour soutenir les politiques relatives aux enseignants et améliorer l’apprentissage

La multiplication des situations de crise et d’urgence touchant le secteur de l’éducation dans le monde entier, telles que la crise actuelle de la COVID-19 et la montée des déplacements forcés, démontrent la nécessité d’une planification de l’éducation réfléchie et adaptée aux situations de crise, notamment dans le cadre des politiques nationales relatives aux enseignants. En tant que travailleurs de première ligne, les enseignants sont les mieux placés pour favoriser l’apprentissage et le bien-être des enfants et des jeunes déplacés par des conflits ou des crises, et pour les empêcher d’abandonner l’école, à condition qu’ils bénéficient eux-mêmes d’un soutien approprié. Les enseignants peuvent également jouer un rôle important dans la planification adaptée aux situations de crise, à condition qu’ils soient correctement formés, soutenus et équipés.

Ce webinaire sur les politiques enseignantes et la planification adaptées aux situations de crise dans les situations d’urgence et de déplacement s’appuiera sur la Note d’orientation sur l’élaboration d’une politique enseignante adaptée aux situations de crise, élaborée conjointement par l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), le HCR, l’Organisation internationale du Travail (OIT) et le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) en 2020 dans le cadre de l’Initiative norvégienne sur les enseignants. Il mettra en lumière certaines des principales dispositions nécessaires pour s’assurer que les politiques enseignantes sont également adaptées aux situations de crise. Par ailleurs, le webinaire donnera le coup d’envoi d’un processus de consultation visant à créer un nouveau module sur les politiques enseignantes adaptées aux situations de crise, qui viendra compléter le Guide pour l’élaboration d’une politique enseignante élaboré par l’Équipe spéciale internationale sur les enseignants pour Éducation 2030.

Pour en savoir plus, consultez la note de cadrage. Pour vous inscrire, cliquez ici.

Une interprétation simultanée des échanges sera proposée en anglais et en français. Pour toute question concernant le webinaire, veuillez contacter berquin@unhcr.org.

Crédit photo : Eduardo Soteras

**Regardez les enregistrement en anglais et en français. **