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  • 08.07.2020

Les répercussions de la pandémie de COVID-19 sur les enseignants contractuels en Afrique subsaharienne

Basé sur une recherche effectuée par Pierre Varly pour la TTF, ce document s’intéresse aux répercussions du COVID-19 sur les enseignants contractuels des secteurs public et privé dans plusieurs pays d’Afrique et propose des recommandations visant à améliorer la résilience du système éducatif en cas de fermeture des établissements scolaires. Il a été publié pour marquer la sortie du rapport de l’Équipe spéciale sur les enseignants sur le recours aux enseignants contractuels en Afrique subsaharienne (résumé exécutif disponible en français et rapport complet disponible en anglais).

 

La crise mondiale de l’éducation à l’heure actuelle

La pandémie de COVID-19 a eu une incidence sans précédent sur les systèmes éducatifs. Au plus fort de la pandémie, 194 pays ont décidé de fermer l’ensemble de leurs établissements scolaires, affectant ainsi 63 millions d’enseignants des cycles primaire et secondaire. L’Afrique subsaharienne n’a pas été épargnée pendant cette crise : on estime que les fermetures d’établissements scolaires à l’échelle nationale ont affecté 6,4 millions d’enseignants.

 

Qui sont les enseignants contractuels ?

Les enseignants contractuels sont recrutés par des voies différentes et acceptent de travailler en dehors des régimes d’emploi classiques dans le cadre d’une convention collective de la fonction publique. Ils perçoivent un salaire pour le travail effectué, mais ne bénéficient d’aucun des avantages prévus par les normes du secteur public, tels que les congés annuels, la pension de retraite ou encore l’assurance maladie.

Si les enseignants contractuels détiennent généralement les mêmes qualifications académiques que leurs collègues de la fonction publique, ils sont souvent mal formés en pédagogie et ne bénéficient pas des programmes de formation professionnelle continue. En raison de leur statut, les enseignants contractuels sont généralement moins bien payés et ont une situation moins stable, car leur emploi dépend des fluctuations du budget public, de la pression exercée sur les marchés et des capacités de paiement des prestataires d’éducation. 

En pratique, les enseignants contractuels ne peuvent être définis d’une seule manière. En Afrique subsaharienne francophone, par exemple, les termes « enseignant à temps partiel », « enseignant contractuel de l’État », « enseignant communautaire », « enseignant contractuel du service national » et « enseignant bénévole » désignent tous différents types de contrats d’enseignant. Les enseignants du secteur privé sont aussi parfois considérés comme des enseignants contractuels, car ils sont souvent payés directement par les écoles grâce aux frais de scolarité versés par les familles des élèves. Ils sont généralement moins bien payés que leurs collègues du secteur public. Il existe également différents accords public-privé, qui affectent le versement des salaires de diverses manières.

 

Les enseignants contractuels, un moyen d’élargir l’accès à l’éducation 

Pour réaliser le quatrième objectif de développement durable (ODD) (« Assurer l’accès équitable de tous à une éducation de qualité et promouvoir les possibilités d’apprentissage tout au long de la vie ») en 2030, le monde aura besoin d’environ 69 millions d’enseignants, dont 17 millions pour l’Afrique subsaharienne seule. Pour pallier la pénurie d’enseignants à laquelle sont confrontées de nombreuses écoles d’État, le secteur public a recours aux enseignants contractuels, notamment dans les pays d’Afrique subsaharienne où la population d’âge scolaire s’est développée plus rapidement que le système éducatif des pays. D’autres pays ont bâti des écoles communautaires dans les zones isolées et rurales sur le modèle public-privé, qui font appel à des enseignants payés par les communautés locales ou au moyen de subventions gouvernementales.  

Il est essentiel de comprendre l’impact de la pandémie de COVID-19 sur les enseignants contractuels, car ils représentent une proportion élevée du corps enseignant dans de nombreux pays. Selon le Rapport d’État d’un système éducatif national (RESEN), ils représentaient au Niger 71 % de l’ensemble des enseignants des cycles primaire et secondaire en 2017, tandis que les enseignants communautaires sous contrat constituaient au Tchad 64 % des enseignants du cycle primaire en 2014. Si la proportion d’enseignants contractuels dans le corps enseignant du cycle primaire au Burkina Faso était infime en 2002, elle est passée à 81 % en 2015. À l’inverse, la proportion d’enseignants contractuels au Mali est passée de 79 % à 29 % entre 2009 et 2014. Cette diminution fait suite à la décision prise par le gouvernement sous la pression des syndicats enseignants, à savoir intégrer plus de 40 000 enseignants contractuels et communautaires au corps enseignant de la fonction publique.

 

Paiements retardés et autres incidences sur les enseignants contractuels du secteur public

Le COVID-19 a affecté l’emploi et le salaire des enseignants contractuels du secteur public de différentes manières. Les contrats des enseignants contractuels du secteur public au Cameroun, au Niger et en Zambie n’ont pas été suspendus. Les enseignants ont également perçu des versements de salaire régulier malgré la fermeture des établissements scolaires. 

Cette situation contraste avec celle du Togo, où les enseignants « bénévoles » représentent respectivement 27 %, 41 % et 25 % du corps enseignant du cycle primaire, du premier cycle du secondaire et du second cycle du secondaire. Leurs contrats n’ont pas été suspendus ni résiliés, mais le versement régulier des salaires s’est avéré plus compliqué. Fin mai 2020, l’Agence nationale du Volontariat au Togo (ANVT) versait des paiements réguliers à près de 900 enseignants contractuels, mais 9 400 autres, soit environ 1 enseignant togolais sur 6, n’avaient reçu aucune aide de l’État. 

Il semble aussi que certains enseignants contractuels au Kenya n’aient pas été rémunérés : le versement des salaires dépend en effet des systèmes de gestion des établissements, et n’a donc pas été possible en raison de la fermeture des établissements scolaires. D’après l’étude menée conjointement par l’UNESCO, l’UNICEF et la Banque mondialesur la riposte des pays face à la crise, le Burkina Faso et la Guinée vont également interrompre les paiements versés aux enseignants contractuels, tandis que le Ghana et la Sierra Leone verseront des salaires revus à la baisse. Selon Filbert Baguma, le secrétaire général du syndicat enseignant de l’Ouganda (Uganda National Teachers’ Union), le versement régulier des salaires des enseignants contractuels a également été affecté dans le pays.

Même si leur situation n’est pas une conséquence directe du COVID-19, 2 500 nouveaux enseignants recrutés à la fin de l’année 2019 au Niger attendent encore de recevoir leur salaire pour les premiers mois de 2020. Comme ils s’étaient endettés pour se rendre jusqu’à leur lieu d’affectation, ils ont été forcés de quitter leur poste pendant le confinement, puis de revenir pour la réouverture des établissements le 1er juin (Internationale de l’Éducation, 2020). En Côte d’Ivoire, le ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement technique et de la Formation professionnelle a annoncé le versement prochain des salaires de 10 300 enseignants recrutés en 2019.

En Gambie, les enseignants temporaires dont les contrats ont pris fin en mars 2020 n’ont pas pu repostuler en raison de la fermeture des établissements scolaires, et perdu de ce fait leur revenu régulier.

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Lisez le résumé exécutif en français et le rapport complet en anglais

Crédit de la photo utilisée pour cet article : Dietmar Temps / Shutterstock.com

Nouvelles
  • 09.09.2020

Soutenir les enseignants dans les efforts de retour à l’école : guide d’utilisation à l’intention des chefs d’établissement

La réouverture des établissements fermés en raison du COVID-19 suscite de nombreuses questions chez les chefs d’établissement. Ils ont pour priorité absolue d’assurer la santé et la sécurité de la communauté scolaire. Parallèlement, ils doivent veiller à ce que les employés en « première ligne » – les enseignants et le personnel de soutien à l’éducation – bénéficient de l’aide, de la protection et des outils nécessaires pour reprendre leur travail.  Les enseignants ont joué un rôle majeur à la suite de la fermeture des établissements en assurant la continuité de l’apprentissage et en maintenant le contact avec les élèves et leur famille. Ils seront tout aussi importants lors de la réouverture des établissements.

L’UNESCO, l’Équipe spéciale sur les enseignants et l’Organisation internationale du Travail ont publié un guide pour aider les chefs d’établissement à soutenir et à protéger les enseignants et le personnel de soutien à l’éducation lors de la réouverture des établissements. Le guide complète le Cadre pour la réouverture des écoles, une initiative conjointe, et les Orientations à l’intention des décideurs publiées par l’Équipe spéciale sur les enseignants le mois dernier. Il regroupe les sept dimensions énoncées dans les orientations stratégiques en une série de questions directrices et de conseils réalisables.

À l’heure où les établissements rouvrent leurs portes, nous améliorons sans cesse nos connaissances sur les problèmes et les occasions que rencontrent les chefs d’établissement et l’ensemble de la communauté scolaire. Au cours des prochains mois, nous ferons en sorte d’être à l’écoute des personnes en première ligne afin de relayer leur expérience et les enseignements tirés auprès des lecteurs.

Figure 1. Les sept dimensions de l’aide au personnel et aux enseignants lors de la réouverture des établissements

Figure 1. Seven dimensions to support teachers and staff as schools reopen

Le guide reconnaît l’importance du contexte local. Dans de nombreux pays, la pandémie évolue de jour en jour. Un vaste éventail de facteurs influe sur les décisions locales au sujet de la date de réouverture des écoles ; ce qui convient pour une école peut ne pas s’appliquer à une autre. Quel que soit le contexte, les chefs d’établissement devront fixer des priorités et reconnaître que des compromis pourront s’avérer nécessaires. Pour faciliter la distanciation physique, les établissements seront peut-être amenés à, par exemple, réduire le nombre d’enseignants et d’élèves présents sur place en rouvrant sur une base sélective et en échelonnant le retour par classe ou par niveau. Il leur faudra peut-être privilégier certaines catégories de population ou certains groupes d’apprenants, tels que les élèves vulnérables et à risque et les enfants de travailleurs essentiels. Dans certains cas, il pourra être envisagé de fermer à nouveau les écoles. Parallèlement, les ressources disponibles pourront être réaffectées afin de faire en sorte que les bâtiments scolaires et les équipements de sécurité soient prêts à être utilisés, ou de mieux préparer les enseignants et le personnel de soutien à l’éducation.

Le guide met en lumière que les chefs d’établissement doivent tenir compte d’aspects clés concernant les enseignants et le personnel de soutien à l’éducation tandis qu’ils adaptent les directives nationales relatives à la réouverture des établissements.

 

  • L’importance de la consultation et de la communication

Les enseignants, le personnel scolaire et leurs organisations représentatives doivent prendre activement part à l’élaboration des politiques et des plans de réouverture des écoles, y compris des mesures de sécurité et de santé au travail visant à protéger le personnel. Communiquer avec les enseignants, les apprenants et le personnel de soutien à l’éducation au sujet de la réouverture des écoles peut permettre de clarifier ce qui est attendu d’eux et de mettre en avant leur rôle dans la réussite des efforts déployés pour garantir un retour à l’école sûr et inclusif, y compris un bien-être général, et le rétablissement de l’enseignement et de l’apprentissage.

Lorsque les autorités centrales décideront de rouvrir les établissements scolaires, il sera important de communiquer rapidement, clairement et régulièrement avec les parents et les communautés scolaires pour comprendre leurs préoccupations et renforcer l’appui aux plans de réouverture. Les parents souhaiteront connaître les mesures de protection mises en place pour limiter les risques sanitaires. Ils auront également besoin d’en savoir davantage sur l’engagement continu de l’école à l’égard des grands principes et objectifs pédagogiques. Les enseignants étant souvent le premier point de contact avec les parents, ils devront être préparés de façon à garantir que chacun reste constamment informé de la situation.

 

  • Rassurer les enseignants et le personnel scolaire quant à leur santé, leur sécurité et leurs droits

Le bien-être des enseignants, du personnel de soutien à l’éducation et des élèves est au cœur de la prise de décisions. Il est important de contrebalancer le souhait de rouvrir les établissements scolaires avec la prise en considération des risques (et des besoins) auxquels font face les enseignants, le personnel de soutien à l’éducation et les apprenants, de façon à fournir une réponse efficace aux membres les plus vulnérables de la communauté scolaire.

Une évaluation et un soutien psychologiques et socioémotionnels continus à destination des enseignants et des apprenants peuvent faire partie des interventions menées à l’échelle scolaire pour parer à ces problèmes. Les chefs d’établissement et les enseignants doivent avoir la possibilité de répondre à leurs propres besoins, de prendre soin d’eux et de gérer leur stress. Les chefs d’établissement peuvent aider les enseignants à développer des compétences en matière de gestion du stress et d’adaptation, qui leur permettront d’exercer leur profession efficacement et d’apporter aux apprenants le soutien psychosocial dont ils ont grand besoin. Il est par ailleurs essentiel de comprendre que les établissements scolaires sont un lieu de travail et qu’il importe plus que jamais de respecter les droits et la situation de leurs employés.

 

Avant la réouverture des écoles, les enseignants avaient peur de reprendre le travail et de contracter le virus, tout comme les parents. Nous n’avions pas d’installations d’eau, d’hygiène et d’assainissement, ni de masques, et les classes étaient nombreuses. Discuter avec le personnel de santé nous aurait été d’un grand secours. Par ailleurs, il aurait été rassurant que des psychologues assurent une prise en charge psychosociale dans les écoles. Finalement, nous avons pu obtenir suffisamment d’installations sanitaires et de masques auprès d’une ONG internationale pour que tous les élèves d’une certaine année retournent à l’école pour préparer leurs examens. Les classes étaient scindées en deux », a déclaré le directeur d’une école primaire à Ouagadougou, au Burkina Faso.

 

  • S’appuyer sur l’expertise des enseignants dans le nouvel environnement des salles de classe

Dans la plupart des contextes, le retour dans les salles de classe ne sera pas anodin. Dans certains cas, seuls certains élèves seront présents, dans d’autres, les classes seront alternées. Les plans de cours, les évaluations et les programmes d’enseignement globaux seront adaptés, et il faudra préparer et assurer des cours de rattrapage.

Les chefs d’établissement doivent veiller à ce que les enseignants aient les moyens de prendre des décisions à l’égard de l’enseignement et de l’apprentissage. Ils peuvent, en collaboration avec ces derniers, modifier les programmes d’enseignement et les évaluations en fonction des calendriers scolaires révisés et des instructions émanant des autorités centrales. Les chefs d’établissement doivent également aider les enseignants à réorganiser les salles de classe pour promouvoir une stratégie d’apprentissage accéléré et de rattrapage, tout en respectant les réglementations en matière de distanciation physique.

Les enseignants continuent de jouer un rôle crucial dans l’identification des lacunes d’apprentissage et l’élaboration de réponses pédagogiques. Ceci est particulièrement vrai pour les groupes vulnérables, notamment les familles modestes, les filles, les personnes ayant des besoins particuliers ou présentant un handicap, les minorités ethniques ou culturelles et les personnes vivant dans des zones rurales reculées privées d’accès à un enseignement à distance.

Pour mener à bien la réouverture des établissements, il est important que les enseignants et le personnel de soutien à l’éducation bénéficient d’une préparation professionnelle appropriée afin de pouvoir assumer leurs responsabilités et de répondre aux attentes. La formation, l’apprentissage entre pairs et la collaboration avec d’autres enseignants, aussi bien au sein de l’école qu’en dehors, seront essentiels. De tels soutiens seront particulièrement importants si les enseignants sont amenés à exercer en face à face et à distance et voient augmenter leur temps de travail.

Ceci est la première édition du guide à l’intention des chefs d’établissement, lequel vise à soutenir les enseignants et le personnel éducatif au cours de la pandémie de COVID-19, dans le cadre de leurs efforts de retour à l’école. Il s’agit d’un document évolutif. Il sera mis à jour fin juillet 2020 à l’aide des dernières informations et des nouveaux enseignements tirés au fur et à mesure de l’évolution de la crise et de l’intervention déployée pour y faire face.

Téléchargez le guide. 

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  • 04.06.2020

Sans électricité ni Internet, pas d’apprentissage en ligne : l’histoire de Lara

Shanghai, janvier 2020

Pendant les vacances du Nouvel An chinois, un matin, j’ai appris que nous ne retournerions pas à l’école le 3 février comme prévu. On nous a demandé de nous préparer à dispenser les cours en ligne. Tandis que la pandémie se propageait à travers le monde, le secteur de l’éducation a dû se réinventer rapidement. Des enseignants du monde entier ont communiqué sur les réseaux sociaux, se soutenant mutuellement et partageant leurs expériences pendant cette période difficile. J’ai beau désormais maîtriser davantage l’enseignement en ligne, mon état d’esprit n’est toujours pas serein. Je fais partie des privilégiés qui ont la chance d’avoir accès à de nombreuses ressources. Mais qu’en est-il de ceux qui n’ont pas cette chance ? Je pensais à mon pays, le Mozambique, et à d’autres pays en développement où la grande majorité de la population n’a pas accès à l’électricité et encore moins à l’apprentissage en ligne.

 

Lara, 13 ans, élève de huitième année, commence ses journées en aidant sa famille et participe aux tâches ménagères dans la cabane qui leur sert de logement au lieu d’aller au collège comme elle le faisait avant la terrible pandémie. Lara et sa famille vivent à Manhiça, dans la province de Maputo, au Mozambique. Elle fréquente l’établissement Filipe Nyussi à Maluana. Les parents de Lara n’ont pas terminé l’éducation primaire. Son père, l’unique soutien de la famille, gagne environ 45 dollars par mois, qu’il doit gérer avec précaution pour nourrir sa famille et assurer l’éducation de ses huit enfants.

En dépit des difficultés, il déclare que son rêve est que Lara puisse étudier. Il rayonne de fierté lorsqu’il décrit Lara comme étant une élève intelligente, passionnée et consciencieuse. Mais l’avenir semé d’incertitudes est une grande source d’inquiétude.

La pandémie a contraint les établissements scolaires du Mozambique a fermer leurs portes. La routine quotidienne de Lara a considérablement changé. Elle doit rester à la maison tandis que son père se rend à l’école pour y recueillir les devoirs. Lorsqu’il rentre chez eux après son travail, Lara fait ses devoirs qui seront ensuite corrigés et notés par les enseignants. Son père a parfois dû chercher deux fois les mêmes devoirs, ce qui lui a coûté 160 meticais (environ 2,40 dollars US).

Lara a vraiment envie d’apprendre. Elle est frustrée de ne plus pouvoir consacrer quatre heures par jour à ses études, comme lorsqu’elle se rendait à l’école ; sa nouvelle routine ne lui permet d’étudier que pendant une heure. La famille reconnaît que le niveau actuel de l’éducation est extrêmement bas, mais ne peut malheureusement rien faire pour l’améliorer. Elle se plaint des coûts supplémentaires dus au matériel scolaire imprimé.

La famille de Lara n’a pas accès à l’électricité et, par conséquent, n’a ni la télévision ni Internet à la maison. Cette situation est très fréquente dans le pays. C’est la raison pour laquelle les établissements scolaires ont décidé de fournir des supports écrits par les enseignants afin que les élèves étudient chez eux. De nombreux autres enfants en milieu rural, en particulier des filles, sont confrontés à des problèmes similaires. Si l’éducation est censée être gratuite, nombreux sont ceux qui se plaignent du coût du matériel imprimé. Par ailleurs, le fait de ne pas aller en cours expose les jeunes filles comme Lara aux risques cachés des mariages et/ou des grossesses précoces.

Les établissements scolaires privés en milieu urbain investissent pour dispenser un enseignement en ligne à leurs élèves. Le niveau d’investissement des établissements n’est cependant ni uniforme ni cohérent. Certains établissements privés s’adaptent plus rapidement aux plateformes et aux cours en ligne afin de mieux répondre aux besoins de leurs élèves. Néanmoins, ils dépendent également de la disposition ou de la capacité financière des parents à investir dans l’accès aux technologies, comme la connectivité à Internet, les ordinateurs et les dispositifs mobiles.

Plusieurs études ont montré que l’éducation est de moindre qualité au Mozambique que dans les pays voisins, et que le maintien à l’école des jeunes filles y représente toujours un défi. Le pays peine par ailleurs à fournir une formation adéquate à ses enseignants.

L’éducation en ligne n’est pas une solution réalisable dans un pays où la plupart des personnes sont privées d’accès à Internet. Si des enseignants du monde entier se retrouvent sur les réseaux sociaux pour collaborer et remodeler l’enseignement, certains de leurs collègues et les établissements se trouvant dans des pays moins privilégiés sont cependant laissés de côté.

Nadya Faquir

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Cet article s’inscrit dans la campagne #TeachersVoices de l’Équipe spéciale sur les enseignants, conçue pour mettre en avant les expériences des enseignants qui travaillent chaque jour pour que leurs élèves puissent continuer à bénéficier d’une éducation de qualité en dépit de la pandémie de COVID-19. Pour participer, consultez notre page Web dédiée.

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  • 02.06.2020

La technologie au service de l’enseignement dans les classes virtuelles sur fond de COVID-19

Au Brésil, où j’enseigne dans le primaire et le secondaire, 82 % des élèves fréquentent des établissements publics. En raison des différences sociales régionales, certains d’entre nous ont dû faire face à des situations adverses. Mais l’ensemble des régions est confronté à des problèmes connexes et intervient de différentes manières.

J’exerce dans une communauté extrêmement pauvre, dotée de maigres ressources. Avec mes collègues, nous avons défini la meilleure manière de travailler avec les élèves en tenant compte de leur situation socio-économique. » Les infrastructures et les ressources en matière de connectivité sont insuffisantes, mais la plupart des familles possèdent des dispositifs mobiles, tels que les téléphones portables.

Nous avons conçu et diffusé un guide d’études à emporter chez soi, comprenant des orientations écrites sur le programme scolaire, de sorte que les parents puissent envoyer leurs enfants à l’école à tour de rôle afin d’éviter les rassemblements susceptibles de présenter un danger en raison du COVID-19. Les orientations comprenaient des informations sur les plateformes utilisées, comme WhatsApp et les réseaux sociaux, ainsi qu’un groupe Facebook que nous avions préalablement mis en place pour toutes les classes de l’établissement.

Outre la distribution des orientations imprimées, j’ai diffusé de courtes vidéos sur WhatsApp et Facebook à l’intention de mes élèves. Dans ces vidéos, je leur expliquais les activités à réaliser, dont l’étude de différents sujets allant de l’aptitude à se servir des outils numériques à la réflexion computationnelle et à la capacité de règlement des problèmes ; je travaillais également les compétences sociales et affectives, comme la créativité, l’autogestion et l’autoprise en charge.

J’ai proposé aux élèves des réflexions et des suggestions concernant les activités pratiques. Nous avons ainsi construit une main mécanique. J’ai préparé une série de courtes vidéos sur la créativité, sur la vie de Leonardo da Vinci, sur la durabilité et sur les trois R (réduire, recycler et réutiliser). Dans une autre vidéo, j’ai abordé l’importance de la main mécanique pour l’industrie, pour sauver des vies et pour améliorer la qualité de vie des personnes amputées. Enfin, j’ai encouragé mes élèves à créer une main robotisée avec du carton, de la corde et de la colle et, une fois terminée, à utiliser le hashtag correspond pour publier une photo sur le groupe Facebook de leur classe.

WhatsApp est utile pour dissiper les doutes ; j’ai donc communiqué à mes élèves les plages horaires auxquelles je suis à leur disposition pour résoudre les problèmes et apporter les éclaircissements nécessaires. Ces mesures ont permis de les aider à continuer leur apprentissage.

Outre mon travail d’enseignante, j’écris deux chroniques sur l’enseignement dans des médias de premier ordre. J’ai profité de ce moment pour écrire aux enseignants et aux administrateurs scolaires sur l’utilisation de la technologie dans l’enseignement, en fournissant des informations sur des outils tels que Google Classroom, Zoom, Blackboard, Century Tech, et EkStep. J’ai également écrit sur la planification, l’élaboration et la mise en œuvre des activités, l’évaluation et l’enseignement hybride. J’ai également fourni des orientations sur l’enregistrement des cours, sur des sujets tels que l’intonation de la voix, les séquences didactiques, les horaires, la manipulation des téléphones portables, le son et l’éclairage, car la grande majorité des enseignants ont préparé des cours sans interaction, avec pour seule aide des forums.

J’aide les parents et les familles en leur présentant des astuces et des suggestions sur la manière d’organiser les journées d’étude à la maison (avec des exemples pratiques à l’appui) et d’accroître l’éventail des activités. Je leur ai fait comprendre qu’il est important de créer des listes de livres, de films et de lieux virtuels, comme les musées. Je les ai également conseillés sur la manière d’aider les élèves à déterminer s’ils ont réussi à atteindre tous les objectifs d’apprentissage avec, entre autres, les questions suivantes :

  • L’exercice que je n’ai pas réussi est-il en rapport avec le contenu de la leçon précédente ?
  • Il y a-t-il un facteur qui a détourné mon attention de mes études ?
  • Ai-je compris la question ?
  • Ai-je bien répondu à la question ?
  • Ai-je étudié toute la leçon ?

Nous vivons une période où tout le monde fait un nouvel apprentissage, où il faut apprendre les uns des autres, être à l’écoute et trouver des manières de surmonter les problèmes.

 

Débora Garofalo est professeure de technologie dans l’enseignement public brésilien et responsable de la technologie au sein du Secrétariat de l’éducation de l’État de São Paulo. Elle écrit des chroniques sur l’éducation, est lauréate de prix nationaux et faisait partie des dix finalistes de l’édition 2019 du Global Teacher Prize de la Fondation Varkey.

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Cet article s’inscrit dans la campagne #TeachersVoices de l’Équipe spéciale sur les enseignants, conçue pour mettre en avant les expériences des enseignants qui travaillent chaque jour pour que leurs élèves puissent continuer à bénéficier d’une éducation de qualité en dépit de la pandémie de COVID-19. Pour participer, consultez notre page Web dédiée.

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  • 25.05.2020

De près ou de loin en tant qu’équipe : travailler ensemble pour obtenir de meilleurs résultats

L’esprit TEAM (Together Everyone Achieves More, Travailler ensemble pour obtenir de meilleurs résultats) est au cœur de ma philosophie de l’enseignement et de l’apprentissage. Au cours de mes 18 ans de carrière, j’ai remarqué que l’esprit TEAM a suscité chez les apprenants un sentiment d’appartenance à leur communauté d’apprentissage, fondamental pour leur épanouissement social, affectif et cognitif.

Pendant la crise du COVID-19, le maintien de l’esprit TEAM a contribué de manière essentielle à la continuité de l’enseignement.

L’esprit TEAM à distance

Connexion de la communauté professionnelle

Dès le début de la crise du COVID-19, le personnel des établissements scolaires s’est rapidement mobilisé. Tout le monde y a mis du sien pour soutenir la transition vers l’apprentissage à distance. Dans un premier temps, des livres Google ont été mis à la disposition de tous les enfants qui les ont emportés chez eux pendant la durée de la crise ; par ailleurs, des séances de perfectionnement du personnel ont permis aux enseignants de se familiariser avec l’enseignement en ligne à l’aide de Google Classroom. Avec le confinement, les séances en ligne ont remplacé les séances initiales en face à face. La force de notre communauté professionnelle s’est manifestée dès le début : les collègues s’entraidaient pour amorcer la transition, maîtriser les nouveaux outils éducatifs et trouver la manière de soutenir l’enseignement à distance. Parmi les applications de Google utilisées par les enseignants figurent Google Classroom, Google Meet et JamBoard. Dans Google Classroom, les formulaires Google servent de supports aux questionnaires ; les vidéos et les activités interactives en ligne relatives à l’enseignement comme EdPuzzleLegends of LearningABCYa et YouTube ont aidé les apprenants à se familiariser avec les contenus.

Les réunions hebdomadaires du personnel via Google Meet ont été très utiles pour promouvoir le bien-être du personnel et des enseignants, qui ont pu partager leurs inquiétudes et leurs réussites, obtenir les mises à jour de Google Education, et se préparer pour la semaine suivante. Ces réunions m’ont fait comprendre l’importance que revêt le maintien de relations étroites au sein de la communauté professionnelle afin de garantir la continuité de l’enseignement et de l’apprentissage.

La formation professionnelle était disponible dans les établissements et au niveau des districts. Le directeur de la technologie et des médias de notre établissement et le spécialiste de l’intégration des technologies à l’échelle du district ont fourni un soutien pédagogique individuel et en petits groupes portant sur différentes technologies via Zoom et Google Meet. J’en ai bénéficié directement, apprenant à utiliser Flipgrid, Screencastify et Google Slides pour intégrer les animations en volume dans ma programmation.

L’un des points forts de cet appui à la formation professionnelle est l’ouverture à l’égard des intérêts personnels. Le spécialiste de la technologie au niveau du district a immédiatement adhéré à mon projet de forum destiné à la communauté d’apprentissage professionnel du district et y a donné suite en créant un forum pour les enseignants de l’école élémentaire. Cet espace favorise l’entraide, les débats spécialisés et le partage d’expériences pratiques.

 

Construire la communauté en établissant des liens avec les parents

J’ai eu recours à la technologie pour établir des liens TEAM avec les parents. Cette démarche a surtout consisté à aider les parents à se familiariser avec le nouvel environnement d’apprentissage et à s’y intéresser. Les parents peuvent me contacter pour me transmettre leurs retours, me poser des questions et résoudre leurs dilemmes en « visitant » Google Classroom à l’aide de courriers électroniques réguliers et de séances tenues en temps voulu dans Google Meet. Les parents sont devenus « membres des classes » dans Google Classroom et ClassDojo, où ils peuvent suivre l’activité de leurs enfants et consulter le dossier de leur travail. « La collaboration étroite entre les enseignants, les parents et les enfants a contribué de manière déterminante au succès de l’apprentissage en ligne. 

 

Rien de mieux que la routine : maintenir le contact avec les élèves

La mise en place d’un cadre TEAM avec les enfants a contribué de manière essentielle à garantir la continuité de leur apprentissage. La routine a joué un rôle important. Les enfants accèdent à leur programme quotidien et aux activités des leçons dans Google Classroom. Chaque matin, nous commençons par une réunion, qui reprend de nombreux éléments de nos sessions initiales habituelles de 30 minutes en salle de classe.  Par ailleurs, ClassDojo s’est avéré être une ressource précieuse pour maintenir l’accent sur le travail en commun. Je peux vérifier les présences, partager des vidéos à l’appui des thèmes en rapport avec l’apprentissage social et affectif, fournir des incitations positives et créer les dossiers des élèves. Toutes ces activités reflètent celles auxquelles les enfants étaient habitués en salle de classe, ce qui les a aidés à maintenir le sentiment d’appartenance à leur classe.

À l’échelle de l’établissement, nous avons mis au point un programme d’informations quotidiennes, écrites et présentées par le professeur d’éducation physique. Ce programme a maintenu le rituel du début de journée dans l’établissement, comme la communication des anniversaires du jour, la délivrance de certificats, et les prières et le serment d’allégeance au drapeau dirigés par les élèves de sixième année.  Le programme d’informations quotidiennes présente les photos envoyées par les enfants, témoignant des activités auxquelles ils ont participé et du travail qu’ils ont effectué. Ces moments de partage sont précieux et renforcent notre cohésion en tant que communauté.

 

Une autre manière d’enseigner

Il est indéniable que la crise a stimulé ma créativité, mon sens de l’innovation et mes approches modulables. Elle a mis en lumière l’importance de la continuité de la formation professionnelle. La mise en pratique de l’apprentissage à distance des enfants ne s’est pas faite à la légère – garantir l’inclusion des aspects sociaux et affectifs ; s’assurer que les enfants sont connectés en tant qu’apprenants ; et tenter d’introduire de nouveaux concepts et outils qui ne facilitent pas toujours les pratiques essentielles à l’apprentissage des enfants, demandent de la résilience, des réflexions constantes et une disposition à toujours « faire une nouvelle tentative » !

Wendee White

Enseignante de cinquième année du primaire, Syracuse, NY, États-Unis

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Cet article s’inscrit dans la campagne #RecitsdEnseignants de l’Équipe spéciale sur les enseignants, conçue pour mettre en avant les expériences des enseignants qui travaillent chaque jour pour que leurs élèves puissent continuer à bénéficier d’une éducation de qualité en dépit de la pandémie de COVID-19. Pour participer, consultez notre page Web dédiée.

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  • 20.05.2020

Enseignement : une nouvelle méthode mixte

En tant que professeure principale, j’ai toujours pensé que l’enseignement ne se limite pas à la préparation d’un programme scolaire pertinent et à la transmission des connaissances connexes. L’enseignant a également pour mission d’encourager les enfants à penser par eux-mêmes en leur apprenant à prêter attention à leur vie et en leur inculquant les compétences nécessaires à des fins diverses. Les processus scolaires habituels m’ont toujours semblé trop rigides. Si les enfants ne passent pas du temps à ne rien faire, comment vont-ils comprendre l’importance de la discipline et de l’engagement ?

Le confinement dû au COVID-19 m’a réellement aidé à trouver la réponse à une question qui me taraudait depuis longtemps : « Est-il nécessaire que l’enseignement et l’apprentissage soient confinés entre les quatre murs d’une salle de classe ? La réponse dans le cadre de cette nouvelle situation est « absolument pas ». La technologie a donné à cette vaste planète une vraie dimension locale. La présence physique n’a pratiquement pas d’importance, mais, les outils adéquats et leur utilisation pertinente sont déterminants.

 En 2008, j’ai lu que de nombreux travaux étaient en cours pour généraliser les activités en ligne et qu’à l’avenir, des dispositifs d’autoapprentissage conviviaux verraient le jour. Ce n’est que pendant le confinement que j’ai compris que cette nouvelle ère était arrivée. En quelques jours, j’ai appris à utiliser et à manier Zoom, Jitsy, Microsoft team, Google Hangouts et de nombreuses autres plateformes. Le monde numérique est devenu la nouvelle réalité !

En une semaine, je dispensais mes cours par l’intermédiaire d’une application. J’ai suivi une formation formelle auprès de différents organismes, mais j’ai surtout appris à force d’expérimenter et d’essayer. Mes débuts dans le monde virtuel (électronique ou en ligne) n’ont pas été aisés, mais après quelques jours, j’ai constaté que la technologie fonctionne la plupart du temps, en dépit de quelques perturbations occasionnelles, de distractions virtuelles et de problèmes au niveau du son et des images. J’ai d’abord pensé que cette nouvelle modalité d’enseignement était une communication à sens unique mais j’ai rapidement compris qu’il est possible d’animer la pratique en ajoutant des enquêtes, des études et des vidéos entre les séances. J’ai été éblouie par la technologie, car dans les écoles rurales, nous ne pouvons tout simplement pas nous permettre une telle diversité.

Les premiers jours, c’était comme un jeu et les élèves étaient nombreux à suivre les cours ; mais je me suis bientôt aperçue que leur assiduité déclinait et que le nouveau jouet ne les intéressait plus. De multiples hypothèses étaient envisageables : problème de réseau, impossibilité pour les élèves d’entendre ma voix, surcharge de travail dans les champs avec leur père ou dans la cuisine avec leur mère, impossibilité de voir mon écran ou – pire encore ! – il se pouvait que mes cours n’étaient pas intéressants. Mais quand j’ai utilisé la boîte de discussion, la conversation est soudainement devenue bilatérale – les élèves, auparavant muets, ont commencé à parler de leurs problèmes dans la boîte de discussion.

Quant à moi, des bruits simultanés me distrayaient, mais j’ai rapidement compris que je devais cesser de faire plusieurs choses à la fois, être attentive et transmettre la même attitude à mes élèves. Je leur ai finalement appris des processus cognitifs de haut niveau en lien avec la pleine conscience.

Chaque fois que vous pensez qu’une réponse n’est pas satisfaisante et que l’assiduité est insuffisante, il suffit d’appeler les élèves. Il est utile d’établir une bonne communication avec les élèves et de savoir les convaincre de la nécessité d’étudier. La culture de mon pays, l’Inde, est axée sur la famille, et il est toujours aisé de téléphoner aux parents pour que les enfants suivent à nouveau les cours.

Néanmoins, la piètre qualité des réseaux, et les coûts élevés des données et des dispositifs posent un réel problème, qui pourrait être résolu en fournissant un réseau subventionné et gratuit. Les bibliothèques des villages et des villes pourraient être transformées en salles virtuelles, dotées d’ordinateurs portables, de tablettes et de connexion à Internet. Si l’apprentissage est gratuit, tout le monde peut devenir ce qu’il veut.

Dr. Neeru Arora

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Cet article s’inscrit dans la campagne #RecitsdEnseignants de l’Équipe spéciale sur les enseignants, conçue pour mettre en avant les expériences des enseignants qui travaillent chaque jour pour que leurs élèves puissent continuer à bénéficier d’une éducation de qualité en dépit de la pandémie de COVID-19. Pour participer, consultez notre page Web dédiée.

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  • 15.05.2020

Les élèves du préscolaire sont épanouis dans l’apprentissage à distance, mais ils aspirent à retourner à l’école

Bonjour à tous depuis la Turquie. Je m’appelle Nurten Akkuş, je suis l’une des 10 finalistes du Global Teacher Prize. J’enseigne dans le préscolaire – mes élèves ont entre 3 et 6 ans. Je travaille dans une région défavorisée au plan socio-économique, où je m’efforce de changer et d’améliorer la vie des populations par l’éducation. Je prête une grande attention aux caractéristiques individuelles de mes élèves et nous avons adapté notre classe et notre école à leur développement. Nous aimons leur enseigner sur un mode ludique, en les encourageant à découvrir tous ensemble. Avant l’arrivée du coronavirus dans notre vie, nous avions un excellent cadre scolaire, mais nous avons dû soudain transposer sur les médias numériques le cadre éducatif que nous avions créé.

Le virus a fait son entrée dans notre pays au début du mois de mars. La panique était générale, le monde prenait conscience de l’épidémie et des milliers de personnes mouraient. Notre ministère de la Santé et les administrateurs de l’État a indiqué les précautions à prendre. Les écoles ont été mises en vacances. La population du pays a été appelée à « rester à la maison » pour tenter de prévenir la propagation du virus.

Le monde entier traverse une période très difficile. Les écoles sont fermées dans de nombreux pays, nous ne pouvons plus enseigner en face à face. Mais nous sommes des enseignants et nos élèves et leurs familles restent très importants pour nous. Il a été très difficile d’expliquer cette situation à tous nos élèves, parce que nous aimons apprendre et être à l’école avec nos élèves. Les familles et les enfants étaient très inquiets à propos du virus. Je voulais réduire leur anxiété avant de commencer l’enseignement en ligne. Je devais les motiver.

J’ai d’abord parlé aux familles. Je leur ai dit que même s’il fallait se tenir au courant de l’actualité, une anxiété excessive allait avoir un impact négatif sur les enfants. J’ai fait de l’éducation familiale en ligne. Nous communiquons constamment avec les groupes que nous avons créés avec les familles.

Puis j’ai parlé à mes élèves en ligne. Avec eux, l’expérience a été différente. Je leur ai dit que nous allions devoir faire attention à l’hygiène, ce qu’est le virus, d’une façon simple, adaptée à ces groupes d’âge. J’ai demandé aux enfants de créer chez eux un centre d’activité. Ils ont rendu leur cadre familial ludique.

Notre ministère de l’Éducation nationale a créé un excellent système. Les chaînes de télévision ont apporté leur soutien à l’enseignement à distance. Un contenu de formations en ligne, des activités de jeux et des livres ont été préparés. Ce système nous a permis de mettre en place une salle de classe en ligne. C’est là que nous partageons nos activités quotidiennes. Nous partageons également le flux éducatif quotidien avec les familles et nous leur permettons de participer à ces activités. Nous faisons avec nos élèves de nombreuses activités : pratiques artistiques, sciences, soins aux plantes, formation aux compétences essentielles, activités gratuites, théâtre, dessin, mathématiques et éducation linguistique. Ce processus a permis d’apporter un soutien psychologique aux élèves et aux familles de notre pays.

En Turquie, tous les enseignants sont en communication constante avec leurs élèves. Les méthodes d’enseignement à distance et le contenu éducatif sont développés par notre ministère de l’Éducation nationale. Bien que mes élèves soient jeunes, ils sont obligés d’apprendre par des méthodes d’apprentissage à distance et les familles et les enseignants jouent un rôle actif dans ce processus. Je donnais auparavant des conférences en Turquie et dans de nombreux pays, maintenant je les donne en ligne. Bien que les enseignants continuent de penser que l’enseignement en présentiel est très important, ils estiment maintenant que, compte tenu de la situation critique dans le monde, les possibilités de l’enseignement à distance devraient être bien connues.

La Varkey Foundation, qui œuvre au renforcement des capacités des enseignants, offre une formidable possibilité aux enseignants de se rencontrer en ligne pour discuter des méthodes utilisées dans les différents pays du monde.

En très peu de temps, nous nous sommes habitués à vivre avec le numérique, dans notre vie et pour l’apprentissage. Bien sûr, être avec nos élèves dans notre école nous manque. Nous leur manquons aussi, mais la santé de mes élèves est très importante. Et ils ne doivent pas non plus être privés de leur éducation. J’espère que cette épidémie se terminera le plus tôt possible dans mon pays et dans le reste du monde, pour que tous les peuples du monde soient en bonne santé et que tous les enfants puissent retourner à l’école.

Nurten Akkuş

Nurten Akkuş a été finaliste du Global Teacher Prize de la Fondation Varkey.

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Ce blog fait partie de la campagne #RécitsdEnseignants de l’Équipe spéciale internationale sur les enseignants, créée pour mettre en avant les expériences des enseignants travaillant chaque jour pour s'assurer que leurs élèves continuent de bénéficier d'une éducation de qualité malgré la pandémie de COVID-19. Les modalités de participation sont disponibles sur notre site.

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  • 09.05.2020

Adapter son enseignement en période de pandémie mondiale

Dès le début de cette pandémie mondiale, j’ai eu à cœur d’aider à protéger la santé et le bien-être de mes élèves, de maintenir une certaine continuité dans nos habitudes et de répondre à leurs besoins d’apprentissage. Tout au long de mon adaptation et de mon évolution face à la situation, quatre principes ont présidé à ma réponse pédagogique :

  • Rester simple. Pédagogie et relations basées sur des outils technologiques.
  • Réduire l’apprentissage à l’essentiel.
  • Se concentrer sur le maintien des liens et des relations, c’est ce qui compte.
  • Ne pas se préoccuper d’une évaluation trop rigoureuse.

Je sais que les expériences d’apprentissage que je conçois sur le campus ne sont pas faciles à reproduire dans l’apprentissage à distance. En un bref laps de temps, j’ai appris à utiliser les outils qu’offre l’apprentissage en ligne ; à trouver l’équilibre entre les liens et la collaboration synchrones et asynchrones (si vous avez déjà visionné une vidéo de 60 minutes sur YouTube, vous comprendrez ce que j’essaie d’éviter !) ; à instaurer la confiance et à cultiver l’engagement dans un environnement en ligne.

Au début de chaque semaine, je charge mes instructions d’apprentissage dans le système de gestion de l’apprentissage scolaire. Après avoir fait le point par une visioconférence hebdomadaire, je donne à la classe une série d’exercices ou de projets courts – les cours sont divisés en petits groupes de tutoriels en ligne sur les forums de discussion – et je précise les horaires de travail pour répondre aux questions et fournir un retour.

La transition a été difficile et les efforts surhumains déployés par l’ensemble de la profession enseignante à travers le monde, dans ces circonstances difficiles, ont été impressionnants. Il y a eu quelques problèmes au démarrage et j’ai dû me fier à mon jugement professionnel. Après tout, j’apprends à enseigner à distance en pleine pandémie mondiale.

Pendant la première semaine, la courbe d’apprentissage a été abrupte, il a fallu gérer la fatigue en ligne et j’ai dû repenser la façon d’engager les élèves et d’être en empathie avec leur vécu. Il est vraiment important de communiquer en ligne avec les élèves et de concevoir des tâches interactives. Cela devient plus facile après la courbe d’apprentissage initiale.

Mes élèves adaptent également leur façon d’apprendre et cela a représenté un grand effort d’ajustement. Ils ont été extraordinaires, faisant preuve d’indépendance, développant leur capacité à s’autogérer, faisant face aux frustrations. Quand je leur ai demandé de décrire en un mot leur sentiment sur l’apprentissage à distance, ils ont répondu : « neutre », « esprit ouvert », « curieux », « différent », « intéressant », « passionné », « isolé », « relaxant », « flexible » et « incertain ».

Les parents ont été des modèles de patience et de partenariat. Deux exemples de courriels que j’ai reçus :

« Nous sommes très reconnaissants pour tout ce que l’école fait afin que nos enfants restent connectés et progressent. Merci à tout le personnel pour son travail incroyable. »

« Nos trois enfants ont dû gérer un cadre d’apprentissage changeant sans que nous soyons physiquement présents pour les soutenir. Malgré l’évolution rapide de ce cadre, ils ont très bien fait face et je suis fier de leur résilience et de la perspective positive qu’ils ont dans cette période difficile. J’attribue à l’approche et au soutien fournis par l’école une grande partie de la facilité ressentie pendant cette période de transition. »

La semaine prochaine, je vais offrir aux parents et aux élèves la possibilité de donner leurs impressions, alors que je navigue à vue pour affiner mes techniques d’enseignement à distance. Mes compétences pédagogiques évoluent et je profite de la stimulation, de la collégialité et de la créativité de cette courbe d’apprentissage professionnel abrupte.

 

Cameron Paterson

Cameron Paterson a été finaliste du Global Teacher Prize de la Fondation Varkey. 

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